Trauma & Guérison: L’injustice d’être responsable de réparer ce que d’autres ont brisé.

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L’une des réalités les plus douloureuses que doivent affronter les personnes ayant vécu des traumas est l’injustice inhérente à leur situation.
Les survivants de traumatismes, en particulier ceux qui ont été victimes d’abus, de violences ou de négligence, portent les séquelles d’expériences qu’ils n’ont pas choisies et qui les ont profondément marqués.

En tant qu’enfants, adolescents, ils n’étaient pas responsables de ce qui leur est arrivé.
Pourtant, une autre injustice se fait souvent jour en devenant adultes : bien que nous ne soyons pas responsables de nos blessures, nous devenons responsables de notre guérison et de notre reconstruction.

L’injustice fondamentale : être blessé sans en être responsable

La première injustice à laquelle sont confrontées les victimes de traumas est de subir un mal dont elles ne sont pas responsables.
Que ce soit dans l’enfance ou plus tard dans la vie, un traumatisme tel que les abus sexuels, la violence, la négligence, ou tout autre événement hautement perturbant laisse des traces profondes.
Ces événements génèrent souvent des mécanismes de défense et des réponses émotionnelles intenses, telles que l’anxiété, la dissociation, la dépression ou des comportements que l’on peut qualifier de “non adaptés” comme l’auto-sabotage, la colère explosive ou la tendance à répéter des schémas destructeurs dans les relations.

Les conséquences sur l’identité et le comportement

Au fil du temps, ces mécanismes de défense peuvent conduire à des comportements qui ne sont pas en accord avec ce que la personne ressent profondément comme étant son véritable “soi”.
Par exemple, une personne ayant subi un traumatisme dans l’enfance peut, à l’âge adulte, développer des comportements de fuite (éviter les conflits ou les relations intimes), d’attaque (colère explosive, agressivité) ou d’auto-sabotage (relations toxiques, comportements addictifs), qui sont autant de réponses à une menace perçue, bien qu’invisible.
Il s’agit de réactions de survie que l’enfant ou l’adulte traumatisé a adoptées pour s’adapter à un environnement hostile ou insécurisant.

Ces comportements, bien que compréhensibles et souvent automatiques, finissent par créer un décalage entre ce que la personne ressent comme étant sa véritable identité et la manière dont elle se comporte au quotidien.
Ce décalage génère souvent un sentiment de culpabilité, de honte ou de frustration, renforçant ainsi le cycle de souffrance.
Judith Herman, dans Trauma and Recovery, décrit comment ces réactions et comportements ne sont pas des “choix”, mais des réponses conditionnées par l’expérience traumatique.

Prendre conscience de ses schémas : une étape clé

La première étape vers la guérison consiste à prendre conscience de ces schémas.
Il est crucial de comprendre que ces comportements, bien que destructeurs, sont des réponses à un environnement qui, à un moment donné, a été menaçant.
Ce qui a été utile pour survivre peut devenir inadapté à l’âge adulte, dans des contextes de sécurité et de stabilité.
Cependant, prendre conscience de ce décalage sans jugement est essentiel pour avancer sur le chemin de la reconstruction.

La bienveillance envers soi-même joue un rôle central à ce stade.
Il est normal de ressentir de la colère envers soi-même, de la frustration de “ne pas être capable de faire mieux”.
Mais il est important de se rappeler que ces comportements ont été mis en place pour protéger l’individu dans des moments où aucune autre stratégie n’était disponible.

L’injustice de la responsabilité : reconstruire une vie après le trauma

Si nous ne sommes pas responsables des blessures que d’autres nous ont infligées, nous portons cependant la responsabilité de ne pas perpétuer ces schémas à l’âge adulte.
Cela peut sembler incroyablement injuste, et c’est en effet une vérité difficile à accepter.

Pourquoi devrions-nous être responsables de réparer ce que nous n’avons pas causé ? Pourquoi est-ce à nous de porter le fardeau de la reconstruction ?

Le psychologue Carl Jung disait que “nous ne devenons pas éclairés en imaginant des figures de lumière, mais en prenant conscience de nos ténèbres”.
Cela signifie que le chemin vers la guérison et la liberté passe nécessairement par une responsabilisation active.
Si nous ne choisissons pas nos blessures, nous avons la capacité de choisir notre guérison.
Cela implique de reconnaître les comportements hérités du trauma et de s’engager activement dans un processus de transformation pour retrouver un équilibre intérieur.

Responsabilité et pouvoir personnel : reprendre le contrôle

Reconnaître sa responsabilité dans sa propre guérison, loin d’être une punition, peut être vu comme un acte de réappropriation de son pouvoir personnel.
C’est accepter que, bien que nous ayons été impuissants face à ce qui nous est arrivé, nous avons aujourd’hui la possibilité et le pouvoir de changer notre destin.

Il est également essentiel de comprendre que ce chemin de guérison est long et non linéaire. Chaque avancée peut être suivie d’un moment de régression ou de doute, et c’est normal. Le plus important est de continuer à avancer, avec bienveillance, en acceptant que chaque petit pas compte.

Ne pas perpétuer la souffrance : rompre les schémas pour soi et pour les autres

Prendre la responsabilité de notre guérison n’est pas seulement un acte d’amour envers soi-même, mais aussi un moyen de ne pas transmettre nos schémas traumatiques à nos proches, nos enfants, nos partenaires. Les recherches montrent que les traumatismes non résolus peuvent être transmis de génération en génération (ce que l’on appelle parfois le “trauma transgénérationnel”). En faisant ce travail de guérison pour nous-mêmes, nous interrompons ce cycle destructeur et permettons à ceux qui nous entourent de vivre des relations plus saines et plus épanouies.

Conclusion : la voie de la guérison comme chemin de libération

Si l’idée de porter la responsabilité de notre propre guérison peut sembler lourde et injuste, il est important de la voir comme une opportunité de reprendre le pouvoir sur notre vie. Bien que nous ne puissions pas changer ce qui nous est arrivé, nous pouvons décider de la manière dont cela va influencer notre avenir.

Se reconstruire après un traumatisme est un processus lent, mais il est possible et profondément libérateur. Avec le bon accompagnement, la bienveillance envers soi-même, et des outils adaptés, il est possible de retrouver son “self”, de reconnecter avec son essence profonde, et de cesser de vivre sous l’emprise des schémas hérités du passé.

Sources :

1. Bessel van der Kolk, Le Corps n’oublie rien (2014).

2. Judith Herman, Trauma and Recovery (1992).

3. Carl Jung, Psychologie et alchimie (1944).

4. Peter Levine, Waking the Tiger (1997).

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